• Les affaires des Caliente.

    - Dina -

    Je n'allais pas laisser un petit bonhomme comme Milo dans la nature, j'ai bien remarqué qu'il était du genre indépendant, et un peu farceur, mais ce n'était franchement pas un endroit pour lui. Benjamin n'est pas un menteur, mais ses affirmations m'intriguaient tout de même. Ma mère était-elle vraiment si indifférente ? "Caliente" comme elle était à l'époque, elle avait toujours eu les hommes à ses pieds, elle passait de l'un à l'autre sans en être véritablement amoureuse. Nina et moi n'étions que des accidents de parcours, pas vraiment désirées, mais elle nous avait élevées à égalité, et avait toujours trouvé du temps pour nous. Je sais bien que la plupart des gens en ville ne voyaient en elle qu'une chaudasse qui faisait crac-crac à qui mieux-mieux, mais elle n'avait jamais été une mauvaise mère, jamais elle ne nous aurait laissées à l'écart ou remplacées par une de ses conquêtes, comment en était-on arrivé là ?

    Les affaires des Caliente.



    J'ai quitté mon foyer assez brusquement, un an plus tôt, Don Lothario avait fait irruption dans nos vies. Je n'avais jamais vu ma mère aussi éprise d'un homme, d'ordinaire ce n'était que des histoires sans lendemain, puis elle avait commencé à vieillir et avait eu envie de se poser. Elle avait alors fait la rencontre de Don, un homme qui semblait la combler en tout point. Elle qui ne souhaitait jamais nous mêler à ses conquêtes nous en parlait chaque jour, et évidemment il finit par emménager avec nous.

    Les affaires des Caliente.



    Indéniablement, il émanait de cet homme un certain charme, je n'en restais pas moi-même indifférente, Nina non plus d'ailleurs. Je passais outre, mais cette cohabitation devint dérangeante dès lors qu'il s'intéressa à nous, il s'était mis à toutes nous draguer, chacune dans le dos de l'autre, et j'ai commencé à voir sa véritable nature. Pas un simple casanova mais un homme qui aimait nous persuader qu'on était la plus importante à ses yeux alors qu'il allait voir ailleurs à la première occasion. C'était fin, et parfois je doutais de mes propres soupçons à son sujet, alors que toutes ses manipulations se déroulaient sous son nez. J'ai été lâche et j'ai décidé de quitter le foyer, j'ai saisi la première offre pour partir loin d'ici, une colocation.

    Les affaires des Caliente.



    C'est à ce moment que j'ai rencontré Lucas, mais dans ma tête il n'était qu'un moyen de partager le loyer, j'avais d'autres soucis. M'enfuir ainsi de chez moi me faisait me sentir lâche, et tous les bons moments familiaux avec ma mère et ma sœur me manquaient. Cependant je ne pouvais plus rentrer chez moi, rien n'y était comme avant, Nina avait cédé aux avances de Don et le voulait rien qu'à elle, elle ne souhaitait qu'écarter ma mère du jeu. Je n'avais pas réussi à les raisonner, mais j'avais aussi l'impression de les avoir laissées tomber. Avant même que je ne m'en rende compte, je m'étais murée dans un silence, ressassant des souvenirs et des regrets, peut-être que ça aurait pu se passer autrement. Je ne pensais qu'à ce que j'avais laissé derrière moi, je m'étais oubliée quelque part sur le chemin.

    Les affaires des Caliente.


    C'est Lucas qui m'a aidé à me retrouver. Je ne le connaissais pas, je le regardais à peine, il aurait pu être une simple décoration dans mon quotidien. Mais il m'a fait sortir, me vider l'esprit, il m'a aidé à chercher du travail et à me préoccuper de ce qui m'entourait. J'étais un peu réticente au départ, mais je n'avais pas non plus envie de lutter, alors je me suis laissée faire et j'y ai pris goût.

    Les affaires des Caliente.

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    Je ne sais pas exactement quand je me suis rendue compte que j'étais amoureuse, mais j'avançais déjà d'un bon pas vers mon avenir. Nous nous sommes installés ensemble et j'ai souhaité retourner dans mon quartier d'origine. Je n'aurais jamais pensé que ma famille serait contente de me revoir, mais je les avais retrouvé, peut-être aurais-je dû déjà me douter qu'il y avait quelque chose, une distance et une impression de mépris qui s'étaient installées entre Nina et ma mère. Pourtant je n'y ai pas prêté plus d'attention que ça, j'avais mon bonheur à côté, auprès de l'homme le plus gentil et généreux que j'ai jamais connu.

    Les affaires des Caliente.



    Maintenant il me fallait peut-être rouvrir les yeux sur ce qu'il s'était passé pendant mon absence, pendant que ma vie ne m'aurait jamais parue plus parfaite d'autres souffraient, et Don était toujours là... J'allais devoir tremper dans les affaires "Caliente" si je voulais pouvoir faire quelque chose.

    Je frappai à la porte de mon ancien chez-moi, pourtant personne ne m'ouvrit. Mais bon, je connaissais les vieilles habitudes de la famille, avec la clef sous le paillasson. J'entrai donc à l'intérieur, tout ça pour découvrir Nina et Don dans le couloir, en pleine exploration de la cavité buccale de l'autre.



    Je m'éclaircis la gorge, les interrompant et, dès qu'ils se détachent l’un de l'autre, je demande à ma sœur :

    - Nina, aurais-tu vu Milo ?

    Je ne m'attendais pas du tout à ce qu'elle entre soudain dans une colère noire, et se mette à me crier dessus.



    - Mais vous commencez à tous me saouler avec ce gamin ! Je me suis toujours débrouillée pour l'élever comme je le pouvais, alors que j'ai déjà deux enfants, et la façon dont il me l'a toujours rendu c'est en enchaînant les bêtises toutes plus grosses les uns des autres ! Alors non je ne sais pas où il est, et tu veux que je te dise ? TANT MIEUX ! De toute façon il va revenir dans mes pattes très vite, ce n'est pas la première fois qu'il me fait le coup ce morveux.



    - Mais... comment peux-tu dire une chose pareille ! Tu ne t'es jamais demandée pourquoi il faisait ça ?

    - Bah c'est pour faire son intéressant comme d'habitude... et en quoi ça te regarde ? Tu n'vis plus ici de toute façon.



    Je me mords l'intérieur de la joue avant de demander dans un souffle :

    - Je... où est maman ?

    Elle hausse les épaules.

    - À l'étage, dans sa chambre sans doute.

    J'emprunte l'escalier et trouve effectivement ma mère dans sa chambre, assise sur le lit, plongée dans le noir à la seule lumière des lampes, et le regard dans le vague. Je ne retrouve plus dans ses traits la femme forte et sûre d'elle d'autrefois, j'ai l'impression d'être face à un fantôme...



    Je m'assois doucement à côté, elle me fait de la peine mais je me ressaisis, il y a plus urgent pour l'instant.

    - Maman, où est Milo ?

    Elle ne répond rien et baisse la tête, fixant le sol. J’appuie :

    - Maman, où est ton fils ?

    Elle semble enfin réagir et lâche après une profonde inspiration.

    - Je... laisse moi Dina, c'était une erreur il n'aurait jamais dû exister...

    Un frisson d'horreur me parcours et je m’énerve.



    - Comment peux-tu dire ça ?! Tu l'as quand même mis au monde ! Qu'est-ce que tu es devenue maman ? Tu n'étais pas comme ça avec nous, et pourtant tu ne souhaitais pas nous avoir Nina et moi ! Tu...

    Une larme roule sur sa joue et je m’interromps, elle lâche, la voix tremblante :

    - Je ne suis plus toute jeune tu sais... je n'ai plus envie de me battre... et il ressemble tellement à son père...

    Les larmes commencent à dévaler ses joues et je commence à mieux cerner ce qu'il se passe dans la tête de ma mère. Pour elle, Nina a gagné Don, et elle qui était si désirée à l’époque, elle dut se sentir mise au rabais, et elle a tout laissé tomber dans son sillage, même ses enfants...Je me lève et remarque :

    - Tu devrais en parler à quelqu'un maman, et laisser tomber ce type, tu ne mérites pas de finir comme ça... mais Milo ne mérite pas non plus de souffrir à cause de ça.



    Je quitte la chambre et redescends pour me diriger vers Nina et Don. Mais ce n'est pas à Don que je m'adresse, même s'il n'est qu'une ordure il a bien assisté à tout ce qu'il se passait ici, par sa faute, sans réagir, non je m'en prends plutôt à ma sœur.

    - Nina ! Qu'est-ce que tu as fait à maman pour gagner ce type ?! Tu n'es pourtant pas bête que je sache ! Tu sais très bien qu'il te trompe à la moindre occasion ! Pourquoi fermes-tu les yeux ? Tu as bien vu ce qu'il est arrivé à maman ! C'est ce qu'il va te faire ! Il te jettera dès qu'il n'aura plus rien à tirer de toi !

    Je le vois caresser "amoureusement" la joue de ma sœur, un geste qui me donne envie de vomir.



    - Voyons Dina, ne sois pas jalouse de ta sœur, je ne résiderais pas avec elle si elle ne comptait pas pour moi...

    - Bien sûr que non ! Seul l'argent de notre mère t'intéresse ! Nina ouvre les yeux ! Tu es adulte, tu n'as plus le temps pour ces batifolages ! Pense un peu à tes enfants !

    Je constate que la mention de ses enfants semble percuter ma sœur, mais elle se renferme très vite sur elle-même, cherchant courage dans les yeux "amoureux" de Don, avant de riposter :

    - Laisse-moi Dina, c'est ma vie et j'en fais ce que je veux.

    Je grimace face à son ton froid et catégorique, Don esquisse un petit sourire satisfait et je m'avoue vaincue, tant qu'il résidera dans cette maison son emprise n'en sera que plus forte. Je lance à ma sœur :

    - Tu me déçois, je ne te pensais pas aussi cruelle avec ta famille.

    Elle a l'air peinée mais je tourne les talons pour sortir de la maison, je sais déjà que Don aura tôt fait de lui faire oublier ses remords.

    Dès que je ferme le portail derrière moi, je sens mes yeux me piquer, avant que des larmes d'impuissance ne se mettent à rouler sur mes joues. Je n'ai rien pu faire, toute ma famille me paraît étrangère, je ne reconnais plus personne...



    Je rentre chez moi en essayant d'effacer les traces de larmes de mes joues, sans réel succès. Dès qu'il me voit rentrer, Lucas se précipite vers moi.

    - Dina, qu'est-ce qui ne va pas ? Ça c'est mal passé ?



    Je lui déballe tout ce que j'ai pu constater, et je n'hésite pas à bien cracher sur Don, que je prends un peu comme responsable, même si je sais bien que ma mère et ma sœur ont leur part de culpabilité. Tout cela évacué dans les bras de mon mari, je m'assois pour réfléchir, lui à mes côtés. Je ne peux plus faire grand chose pour Nina et ma mère, mais s'il y a bien quelqu'un qui doit être arraché à cette histoire avant qu'il n'en souffre encore c'est bien Milo. J'ai bien une idée de comment m'y prendre, mais il faut d'abord que j'appelle la police et en parle avec Lucas...


    - Clémentine -



    Inspire, expire.

    Je passe le portail de l'école et me dirige vers ma classe en serrant les dents, j'en ai marre de voir les autres me regarder comme si je préparais un mauvais coup. Je ne leur ai jamais rien fait et pourtant ils croient Oliver sur parole ! Je vais essayer de l'ignorer comme l'a suggéré maman mais rien que de voir son petit air supérieur du fond du couloir m'annonce que ce ne sera pas facile...

    Je me réfugie en salle de classe mais même la maîtresse me surveille, si bien que ça en devient un calvaire, comment leur faire comprendre que je ne prépare rien du tout ? J'ai rien fait moi !


    La journée se rythma entre mes quelques minutes de libération au sein de la B.A.P. et les provocations d'Oliver, systématiquement à l’abri des regards, que j'essayai d'ignorer. J'aurais bien aimé le coincer, mais il était trop malin, et c'était pas comme dans les films où je sortais de quoi l'enregistrer quand je voulais là j'avais pas trop le porte monnaie pour moi... Les copains m'assuraient que ça finirait bien par se retourner contre lui un jour, que eux ils croyaient en moi, mais moi j'y croyais plus... J'avais pas envie que mes ennuis leur retombent dessus, alors j'ai préféré rester dans mon coin.



    Alors que j'attendais que la récréation se passe pour enfin attaquer les dernières heures de cours de la journée, le blondinaze se pointa, encore. La maîtresse était plus dans la cour, ça allait être pour ma pomme...



    - Bah alors Taulard tu fais moins la maline maintenant hein ? J't'avais prévenue t'as plus qu'à pleurer.

    - T'arrête pas de mentir et de me tendre des pièges ! Ce n’est pas juste !

    Il hausse les épaules.

    - Bah c'est comme ça dans la vie, il faut des personnes pour prendre pour les autres.

    - Mais j'ai rien fait ! C'est ton frère le responsable !

    - Ouais mais Christian est le futur héritier de Plènozas Industries, il ne doit pas être détesté par les autres ni se sentir en position de faiblesse, il doit dominer quelles que soient les conséquences.

    Je fronce les sourcils.

    - Qu'est-ce que tu racontes ?

    - Bah, c'est trop compliqué pour ta p'tite tête peut-être ? C'est simple pourtant, si les autres te détestent et te rendent responsable de tous leurs maux, ils oublient les écarts de mon frère, et en plus il n'est plus gêné par ta bande ridicule, tu me suis maintenant ?

    J'en reste bouche bée et ça a plutôt l'air de l'agacer.

    - Quoi ? T'as toujours pas compris ?

    - Si mais... je pensais que c'était juste parce que tu me détestais.

    - Hein ? Nan. J'en ai rien à faire de toi moi, tu m’évites seulement les dégâts sur la réputation de Christian.

    Je commence à me rendre compte du fossé qui sépare nos intentions, j'ai toujours aimé être avec la B.A.P. , c'était comme dans un jeu avec la lutte contre le mal. Là j'étais face à quelqu'un qui me parlait comme un adulte aurait pu me parler, avec cette distance qui me donnait l'impression qu'on n'appartenait pas au même monde.

    Je pensais que c'était définitivement terminé pour moi ici, que je n'avais aucune chance de m'en sortir face à quelqu'un qui pensait de cette façon... mais l'aide vint d'ailleurs...


  • Commentaires

    1
    Vendredi 15 Avril 2016 à 19:49

    J'ai lu sur le forum, je n'ai rien de plus à ajouter.

    Merci pour ce beau moment de lecture happy

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